vendredi 5 juin 2015

Illusion



"Par la fenêtre, j’entrevis soudain un autre monde qui n’existait pas mais dont l’image était pourtant là, lumineuse, évidente, indéniable."
Prof. Luc Claret - Phénoménologie des mondes parallèles - Éditions d'Isparues (1898).
Photographie : Shaki Pelott.

dimanche 26 avril 2015

Fondu au temps


La porte de la cuisine est ouverte sur le jardin et le soleil du printemps. Deux cerisiers sauvages en fleurs roses se mirent à un poirier qui fait semblant de ne pas les voir en agitant mollement ses bras enguirlandés de blanc. Là-bas un portique avec ses balançoires attend les jeunes amateurs de sensations qui pour l’instant sont occupés à courir en criant après un ballon multicolore. Une grande table (en fait deux tables plus petites mises bout à bout) recouverte d’une nappe fraîche. La table est dressée de bric et de broc, des assiettes plates et des assiettes creuses, des verres-ballons et des verres Duralex bombés, ici une fourchette neuve se retrouve mariée à un couteau de réforme aux dents fatiguées, là des bouquets de coucous et de primevères dans des vases improvisés. Un vent léger fait onduler les bords de la nappe.

Romy sort la première, elle descend les trois marches qui séparent la cuisine du jardin avec précaution : elle tient un grand saladier. Elle rit d’une remarque qu’on vient de lui faire. Elle se retourne à demi, lance un mot par dessus son épaule, puis repart en direction de la table du jardin. Jean-Louis la suit. C’est lui l’auteur de la remarque qui a fait rire Romy. Il a un sourire aux lèvres. Il tient une bouteille de vin rosé dans chaque main. Quelques secondes se passent, le temps pour Romy et Jean-Louis d’atteindre la table. Yves apparaît à son tour au seuil de la cuisine. Il est en bras de chemises. Il en veut un peu à Jean-Louis de lui avoir volé la vedette, fût-ce un court instant. Il lève la main pour attirer leur attention et déclame de sa voix forte et musicale quelques alexandrins avant de saluer avec emphase. Jean-Louis applaudit, Romy porte les mains à sa bouche, se penche en avant en riant. Gagné ! Yves, satisfait, les rejoint d’un pas ostensiblement tranquille, se reprend, porte théâtralement la main à son front, fait demi-tour, repart à la cuisine, en ressort avec la carafe d’eau qu’il y avait oubliée et qu’il montre comme un trophée. Romy et Jean-Louis échangent un regard : “Il n’en fera jamais d’autres.”


La grille du jardin qui grince : Ludmila et Stéphane reviennent de promenade, bras dessus, bras dessous, penchées l’une vers l’autre, marchant lentement pour laisser encore un peu de temps aux confidences. Marie les suit à quelques pas, l’air indifférent, mais elle leur en veut un peu d’être exclue des secrets.


Le moteur rageur d’une moto qui roule trop vite. Marie se gare sur le côté, mais la moto ralentit : c’est Gérard qui arrive ! Il s’arrête à la hauteur de Marie. On imagine l’invite. “Allez monte ! Fais pas ta chochotte !” Marie hésite, obéit finalement, gênée par sa robe légère, monte en amazone, les voilà partis, trop vite !


“Ils sont fous !”, lance Michel très sérieusement, en appuyant sur le “fous”, sur un ton de reproche. Il était au salon dont la porte-fenêtre est elle aussi ouverte sur le jardin. Le vacarme l’a attiré. Il a un journal à la main, qu’il agite en direction de la moto.
“C’est la jeunesse qui est folle”, lui explique Romy tandis qu’il s’approche à son tour de la table en haussant les épaules.


 La moto ne tarde pas à revenir. Marie en descend  le rose aux joues et tout essoufflée, comme si elle avait couru. Gérard enlève son casque et ses gants comme le ferait un capitaine de la garde royale sûr de son escrime. Ses narines palpitent, il retient un instant les mots qui se pressent à son esprit, éclate de rire avec un coup de menton : “Elle a du courage la petite mine de rien !” Marie feint d’être offensée : “Comment ça mine de rien ?”


Serge est debout sur le seuil de la cuisine. Il se penche un peu sur le côté pour allumer sa cigarette. Il se redresse. Il regarde ses amis en souriant, un sourire qui lèche tout son visage et jusqu’à ses yeux. Son regard vagabonde, s’arrête sur les fleurs de cerisiers.


© Shaki Pelott 2015.
Photographie : Shaki Pelott.

samedi 10 janvier 2015

Bonne année à l'humanité de bonne volonté !

Les  barbares n'y pourront jamais rien : le grand Duduche continuera pour toujours à rêver à la fille du proviseur. 
Avec une pensée pour toutes les victimes de ce nouveau fascisme.
Dessin : Jean Cabu.